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Innovation agile et sensible en action

Comment concevoir un produit en étant centré sur les besoins clients ?

Depuis plusieurs années, les équipes R&D sont de plus en plus sollicitées pour proposer au marché des innovations de qualité voire de rupture. Pour ces équipes, il s’agit alors de connecter des découvertes technologiques à des insights consommateurs, afin de proposer aux clients des innovations versus des inventions. On pressent alors la nécessité de renforcer la consumer centricity, pour proposer des innovations entrant en résonance avec les besoins clients. Alors, comment renforcer sa connaissance du client ? Comment concevoir un produit en étant centré sur les besoins clients ?

A. Qu’est-ce qu’être centré sur les besoins clients ?

1. Définition

Une innovation centrée client est une innovation réalisée en se plaçant du point de vue du client. Pour ce faire, les membres de l’équipe vont se mettre en empathie avec les consommateurs, voire mieux, vont saisir toutes les opportunités de développer le travail de co-création avec eux. Se mettre en empathie, c’est se mettre à la place d’autrui pour comprendre ses sentiments et émotions. L’empathie client consiste à s’immerger dans l’univers du client pour découvrir, face à une situation concrète, ce qui pose problème, ce qui marche, ce qui peut être amélioré… pour imaginer des solutions porteuses de sens.

2. Deux exemples produits

a. La poussette Yoyo de la marque Babyzen

« Je n’éprouvais pas d’affinités particulières avec l’univers de la puériculture, jusqu’à ce que je devienne papa à mon tour. Je me suis alors rendu compte que les poussettes existant sur le marché ne répondaient pas aux modes de vie urbains. Encombrantes, peu maniables, elles passaient à peine dans le coffre d’une voiture citadine », Julien Chauderge, PDG & Cofondateur de Babyzen. En 2012 naît la Yoyo. Ultralégère, ultra-compacte, la poussette repliée ne dépasse pas la taille autorisée d’un bagage de cabine d’avion. Elle passe dans un ascenseur et dans les transports en commun. Résultats : en 2016 la Yoyo est présente dans 70 pays avec 160 000 exemplaires. Par hasard, Julien Chauderge a fait donc l’expérience de l’empathie client. En expérimentant tous les inconvénients d’une poussette classique, il a imaginé des solutions répondant à ses besoins concrets.

b. Les meubles de salles de bain Lapeyre

Un autre exemple de consumer centricity met en lumière l’innovation en mode Design Thinking pour des meubles de salles de bains réalisés par Lapeyre et Saint Gobain pour les personnes âgées. En étant centrées client, les équipes projets ont rencontré des séniors et se sont mises à leur place pour comprendre leurs rêves, désirs, craintes et obstacles. Et elles ont pu ainsi apporter des solutions innovantes.

Les meubles habituellement proposés sont beaux, mais difficiles à manipuler (poignées peu ergonomiques), encombrants et difficiles à bouger ou au contraire trop légers et instables, etc. Ou alors ils sont très pratiques, mais leur design est peu vendeur et leurs couleurs évoquent le mobilier hospitalier. Les équipes ont ainsi créé des équipements qui garantissent la sécurité des utilisateurs, simples d’utilisation et d’entretien, tout en ayant un design soigné, loin des codes des mobiliers hospitaliers ou des maisons de retraite !

Ces illustrations mettent en lumière les opportunités qu’offre l’empathie client. Mettre en place un processus de consumer centricity augmente in fine la satisfaction du client. 

B. Au départ de la conception du produit

Pour mieux appréhender sa relation avec le client, l’équipe projet va remplir chaque outil de marketing agile en fonction de ses connaissances du marché, du challenge lancé et des idées qu’elle a déjà, en termes d’innovation. Les principaux outils sont le carnet de sprints, les user stories et la raison d’être.

1. Le carnet de sprints

Centré client, le carnet de sprints est un canvas synthétique, qui comprend le segment de clientèle, les insights, le challenge, la proposition de valeur et les principes de solutions.

a. Le segment de clientèle

Pour que le produit rencontre son public, il va falloir au début du projet définir le segment de clientèle. Pour ce faire, l’équipe remplit une carte d’empathie autour du persona (qui est la personne cible incarnant l’ensemble des consommateurs potentiels du produit). En se plaçant du point de vue du consommateur, l’empathy map sert à identifier ses pains et ses gains. Elle intègre le nom emblématique du persona associé, ses activités et comportements, les difficultés du persona vis-à-vis du produit et les bénéfices apportés.

Exemple :

– Persona : Lucie, 35 ans

– Comportement : pratique irrégulière du vélo, citadine, vit en couple, 1 enfant

– Pain : “le vélo dans les grandes villes c’est dangereux, je ne suis pas à l’aise”

– Gain : “aller au boulot en vélo augmenterait ma qualité de vie, car je n’aime vraiment pas les transports en commun”

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b. Les insights

L’un des enjeux majeurs pour innover est de détecter un bon insight, intégrant la connaissance conso et les tendances émergentes. L’insight marketing repose sur un travail de formulation problématisée, qui se fait en général par étapes et inclut trois composantes : une volonté, une motivation et une tension. Par exemple : un équipementier sportif souhaite proposer de nouveaux accessoires vélo pour une clientèle féminine. En se mettant en empathie avec cette cible de clientèle, il trouve l’insight suivant : « J’aimerais me déplacer en vélo plus souvent, parce que je trouve cette solution pratique et écoresponsable, mais en ville ce n’est vraiment pas rassurant avec tout ce trafic ».

Avec ces éléments centrés client, l’équipe va pouvoir remplir le reste du carnet de sprints.

2. Les user stories

Les user stories racontent les composantes clés de l’expérience utilisateur. Une user story est concise, et permet d’engager la conversation en interne et avec le client ; l’équipe projet doit pouvoir confirmer son intérêt. Un exemple de user story : « En tant que passionnée de design et de mode écoresponsable, j’ai envie d’acheter ce bureau, car il est produit en Europe et respecte l’environnement ».

3. La raison d’être

Elle résume en une phrase le but ultime du projet, à la fois ambitieux et aspirationnel. Un exemple de raison d’être : « Inventer une crème solaire efficace et écoresponsable afin de concilier santé et respect de l’environnement ». La raison d’être permet de guider l’équipe dans ses décisions pour le choix des fournisseurs, pour les canaux de distribution, pour la stratégie d’activation etc.


C. Pendant la phase « Définir avec empathie »

1. L’hypothèse

En début de sprint, lorsque l’on définit avec empathie, l’hypothèse de départ va également placer au centre le client. L’hypothèse est un énoncé qui guide l’équipe dans ses travaux. À chaque sprint une hypothèse est validée ou invalidée, ce qui permet d’avancer et d’ajuster de sprint en sprint l’innovation produit. Avec la méthode ias.a, l’hypothèse est une phrase affirmative, écrite sous une forme articulée avec des liens de causalité, et elle est vérifiable. Un exemple d’hypothèse : « nous pensons que les utilisatrices de produits solaires seront séduites par notre crème solaire écoresponsable, si le flacon est en matière recyclée ».

Cette hypothèse est idéalement définie par une core team décloisonnée favorisant la relation et le travail entre les différentes fonctions de l’entreprise indispensables au projet.

2. Le PMV

Pour valider ou non l’hypothèse, l’équipe projet va ensuite créer un PMV (Produit Minimum Viable), pour l’expérimenter sur un échantillon de clients. Ce PMV doit permettre de récolter un maximum de feedbacks pour un minimum d’effort. Ainsi si l’hypothèse ne marche pas, l’équipe projet aura passé peu de temps en développement.

3. Le recrutement

Dès cette première étape, l’équipe s’attache à définir le profil exact et le nombre de consommateurs qu’elle souhaite rencontrer pour expérimenter son produit.

Pour continuer avec l’exemple cosmétique de l’hypothèse précédente, l’équipe souhaite recruter sur une durée de 1 heure :

– 10 personnes de phototypes 1 à 3

– Ayant 25 à 35 ans

– Soucieuses de l’environnement

– Qui vont régulièrement à la mer

D. Pendant la phase « Expérimenter »

Après la phase de « Définition », se déroule l’étape « Agir », durant laquelle l’équipe œuvre pour le projet en se synchronisant régulièrement au cours de réunions de travail en ligne ou en présentiel. Selon le planning établi, l’équipe passe ensuite à la phase « Expérimenter ». L’expérimentation est un moment clé où le client est questionné, interviewé sur le développement produit. Cette phase d’échange va permettre de comprendre les ressentis des clients, les points forts, les points faibles du produit pour le conso. Ces conseils et retours vont aider l’équipe à ajuster le produit, rectifier des fonctionnalités, en enlever, etc. L’entretien avec le conso doit être extrêmement bien préparé en amont afin d’être le plus productif possible.

1. Le guide d’entretien

Le guide présente une introduction, la raison d’être inspirante du produit, le PMV et la conclusion. La présentation du PMV est le moment de co-créer avec le client, de lui proposer des pistes d’amélioration, d’écouter les siennes, de rebondir… bref de le placer au cœur de l’innovation !

2. La prise de notes

Elle peut se faire sous la forme d’un PPCO (matrice Plus, Potentiels, Craintes et Options). Cette matrice de potentialisation facilite la prise de notes et met à plat les enseignements de l’expérimentation, ce qui sera précieux pour l’étape suivante.

E. Pendant la phase « Capitaliser »

Avec les retours des consommateurs, l’équipe regarde s’il faut persister dans cette voie ou bien pivoter.

1. Le PPCO

Le PPCO peut être également utilisé à ce stade. Pour l’équipe, il s’agit de se poser les questions suivantes :

– Qu’est-ce qui est bien dans cette idée (Plus) ?

– Peut-on appliquer cette idée à d’autres domaines (Potentiels) ?

– Quels sont les difficultés que cela pose (Craintes) ?

– Quelles solutions proposer à ces problèmes (Options) ?

2. La synthèse globale

À la suite de l’expérimentation client, la synthèse globale vise à prendre du recul et à identifier les enseignements à garder en tête pour la suite du projet, ainsi qu’à l’ajuster en conséquence.

En conclusion

Concevoir un produit en étant centré sur les clients permet d’innover avec eux. Cette approche de co-création offre de nombreux potentiels, permet de capter les tendances du marché et de favoriser le succès du produit. Intégrer les approches agiles, c’est donc prendre la décision d’un développement produit centré client, avec à la clé la satisfaction client et un alignement, une cohérence de la marque dans sa proposition globale. 

Nous espérons que cet article vous fournira quelques pistes précieuses dans votre réflexion ! Et si vous avez envie d’en savoir davantage, n’hésitez pas à nous contacter